Bouquet
Exposition personnelle
Solo show
Galerie Anne-Sarah Bénichou, Paris
2023
« Un palais à Palerme aux murs délavés, les vitrines du musée archéologique de Syracuse, les murs en plomb d’un souterrain fellinien, des chapelles dans la campagne sicilienne et quelques marches sur des volcans... Tels sont les paysages qui se sont récemment sédimentés dans les recherches de Juliette Minchin. Ou bien, plus exactement, qui lui ont permis de cristalliser des orientations prises au cours des mois précédent, et de renforcer dans ses recherches la tension permanente entre force et fragilité, pesanteur et légèreté, éternel et éphémère.
Pour ses premiers travaux, elle utilisait de la cire couleur de chair, fondue dans son atelier comme dans le laboratoire d’un chimiste. De ce matériau doux et ombrageux, elle faisait naître des drapés immobiles sur des structures métalliques. Puis l’expérience d’une tempête qui a bouleversé un accrochage en 2021, à la Monnaie de Paris, l’a poussée à assumer une part performative nouvelle dans son œuvre. L’idée de réparation est devenue partie prenante de sa création. Elle a utilisé le bois, la pierre mais aussi la porcelaine, la céramique pour façonner des lampes en raku dont les formes féminines abritent la flamme d’une bougie, et même des feuilles de plomb avec lesquelles elle a reprisé ses structures et réalisé des malles. Ces matières ont en commun leur malléabilité, mais aussi le fait de pouvoir être récupérées et utilisées selon le rythme d’un éternel retour.
Comme une gerbe de fleurs, ou comme un feu d’artifice, de ceux qui jalonnent la vie quotidienne en Sicile, des mariages aux sorties de prison, l’exposition « Bouquet » réunit un ensemble d’œuvres réalisées au cours de l’année passée. Un bouquet de roses, c’est aussi le motif que Juliette Minchin déploie dans «La Croix, veillée aux épines»à l’abbaye de Beaulieu-en- Rouergue». Cette installation monumentale qui lui a été commandée dans le cadre du programme Mondes nouveaux est à l’origine du panneau présent dans l’exposition, qu’elle a recouvert de cire en le plongeant dans des bains successifs comme les artisans des ciergeries traditionnelles siciliennes. Il sera allumé pour faire entrer dans l’exposition cette part de vie dont elle anime souvent ses objets.
Qu’ils soient purement formels ou que l’on y devine des images, les motifs que Juliette Minchin déploie dans ses œuvres évoquent le sacré, sans s’avancer jusqu’au seuil du religieux. Une couronne de bougies est transformée en sculpture florale – avec épines. Votive, peut-être. Dans ces ambiguïtés de la cire, le ton est tour à tour grave, absurde ou plus léger. Ses grands dessins, qu’elle nomme « Hydromancies », composés par les mouvements de pigments et d’eau sur du papier puis trempés dans de la cire, ont l’allure de parchemins, de mandalas ou rouleaux de prières. D’ailleurs l’esprit s’est même introduit dans ses formes : un œil est apparu dans ces compositions. Peut-être pourrait-on y lire l’avenir. Ils invitent à cultiver l’incertitude. »
Anaël Pigeat
"A palace in Palermo with faded walls, the showcases of Syracuse’s archaeological museum, the lead walls of a Fellinian underground, chapels in the Sicilian countryside and a few steps on volcanoes...These are the landscapes that have recently become sedimented in Juliette Minchin’s research. Or, to be more precise, they have enabled her to crystallize the directions taken in the preceding months, and to reinforce in her research the permanent tension between strength and fragility, heaviness and lightness, eternity and ephemerality.
For her first works, she used flesh-colored wax, melted in her studio as if in a chemist’s laboratory.
From this soft, shadowy material, she created immobile draperies on metal structures. Then the experience of a storm that disrupted a hanging at La Monnaie de Paris in 2021 prompted her to take on a new performative element in her work.The idea of repair became an integral part of her creation.
She has used wood and stone, as well as porcelain and ceramics, to fashion raku lamps whose feminine forms shelter the flame of a candle, and even sheets of lead with which she has mended her structures and made trunks.What these materials have in common is their malleability, but also the fact that they can be reclaimed and used in the rhythm of an eternal return.
Like a sheaf of flowers, or like a firework display of the kind that punctuate everyday life in Sicily, from weddings to prison releases, the from weddings to prison releases, the «Bouquet» exhibition brings together a range of works produced over the past year. A bouquet of roses is also the motif Juliette Minchin deploys in «La Croix, veillée aux épines» at Beaulieu-en-Rouergue Abbey. This monumental installation, commissioned as part of the Mondes nouveaux program, is the inspiration behind the panel featured in the exhibition, which she has covered in wax by immersing it in successive baths like the craftsmen of traditional Sicilian ciergeries. It will be lit to bring into the exhibition the life she often brings to her objects.
Whether purely formal or imagery, the motifs Juliette Minchin deploys in her work evoke the sacred, without stepping over the religious threshold. A wreath of candles is transformed into a floral sculpture -complete with thorns. Votive, perhaps.
In these ambiguities of wax, the tone is alternately serious, absurd or lighter. Her large-scale drawings, which she calls «Hydromancies», composed of the movement of pigments and water on paper, then dipped in wax, look like parchments, mandalas or prayer scrolls. Moreover, the spirit has even crept into these forms: an eye has appeared in these compositions. Perhaps we can read the future in them. They invite you to cultivate uncertainty."
Anaël Pigeat
Photographies © Nicolas Brasseur